Cotonou accueille du 04 au 05 aout 2016, la deuxième édition du Forum Bénin-Suisse. Pour comprendre les tenants et aboutissants de cette rencontre, nous sommes allés à la rencontre du Professeur Edgard Gnansounou, président de la communauté des Béninois de Suisse. Dans un entretien accordé à votre blog, l’homme parle de l’édition 2015, de l’objectif du forum, des participants attendus et surtout du suivi des recommandations de ces assises.
Présentez-vous à nos lecteurs ?
Je suis Professeur à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne en planification énergétique et Président de la Communauté des Béninois de Suisse (CBS). Je réside en Suisse depuis une quarantaine d’années, ce qui ne m’empêche pas de garder de solides liens avec le pays. Je suis d’avis que les Béninois de l’extérieur ont vocation à apporter une contribution particulière au développement socio-économique du pays du fait qu’ils vivent, dans leurs pays de résidence, d’autres expériences dont le Bénin peut éventuellement s’inspirer. Je m’intéresse aussi aux questions socio-politiques, c’est ce qui explique que j’aie commis deux ouvrages dont le dernier plaide en faveur d’une fédéralisation de l’Afrique de l’Ouest (deux nouvelles fédérations en plus du Nigéria) et de la question monétaire, celle du Franc CFA et ceci, dans une perspective différente à celle de la CEDEAO et de l’UEMOA.
Parlez-nous un peu de la communauté des Béninois de Suisse que vous dirigez ?
Nous avons créé la Communauté des Béninois de Suisse (CBS) en 1978 pour développer une solidarité entre les Béninois résidant en Suisse et apporter notre contribution à la vie socio-économique de notre pays d’origine. La CBS est aujourd’hui la seule association représentative des Béninois de Suisse. Elle compte des centaines de membres dont plusieurs y vivent depuis des décennies et sont binationaux.
Vous organisez la 2e édition du forum Bénin-Suisse. Pourquoi un tel forum ?
Le Forum Bénin-Suisse est justement une de ces initiatives par lesquelles la CBS a souhaité apporter au Bénin une contribution spécifique au développement socio-économique du Bénin. Ces dix dernières années, le Bénin a connu de nombreuses crises sociales ponctuées de grèves dont certaines ont duré de nombreux mois. Ceci est un symptôme de dysfonctions importantes dans le dialogue social dans notre pays. La Suisse à l’instar de nombreux pays de l’Europe du Nord a su développer une approche négociée et anticipatrice des conflits professionnels collectifs dont notre pays peut avantageusement s’inspirer. C’est ce qui nous a motivés pour initier en 2014, le Forum Bénin-Suisse dont la première édition s’est déroulée à Cotonou l’année dernière cherche à réunir l’ensemble des partenaires sociaux autour de la nécessité d’anticiper des conflits professionnels collectifs. Les partenaires de ce projet sont : l’ensemble des centrales/confédérations syndicales, le Conseil National du Patronat du Bénin, le Gouvernement du Bénin et la Coopération Suisse.
Quels ont été les succès enregistrés au cours de la première édition ?
La première édition a permis d’identifier ensemble des mécanismes d’anticipation des conflits professionnels collectifs. Il s’agit d’impliquer davantage les syndicats dans les processus de réforme de l’administration publique et en amont du projet de loi des Finances, de manière à ce que les revendications soient prises en considération dans la mesure du possible dans chaque budget annuel, ainsi que dans la programmation budgétaire pluriannuelle.
Quelle est la spécificité de cette deuxième édition ?
La deuxième édition initie l’implémentation des mécanismes identifiés l’année passée. Il s’agit de passer à une étape plus concrète en définissant les conditions-cadres de la mise en œuvre de ces mécanismes.
Qui sont les participants attendus à ce forum prévu pour se dérouler les 04 et 05 aout 2016 à Azalai Hôtel de Cotonou ?
Les participants sont les syndicats, des représentants des entreprises, du Gouvernement, de la Coopération Suisse et de la Société civile, des Béninois de Suisse et de compatriotes ayant vécu en Suisse, soit environ 140 participants.
Quelles sont les mesures prises pour un meilleur suivi des recommandations de ces assises quand on sait qu’elles finissent très souvent dans les placards ?
Un comité de suivi sera mis en place dans le cadre de l’Édition 2016. Les partenaires sociaux y seront représentés de manière paritaire. Le Comité se transformera ensuite en Observatoire du dialogue social, un cadre pour veiller à l’application des recommandations du Forum et renforcer la capacité de l’ensemble des partenaires, en vue d’une cohésion sociale plus forte dans notre pays.
Votre mot de fin ?
J’aimerais appeler les forces sociales de notre pays à exercer la pression nécessaire sur l’ensemble des partenaires sociaux afin de les inciter à résoudre les problèmes, de manière anticipée, par la négociation et d’éviter de courir de crises en crises pour éteindre le feu. Le Bénin n’est pas seul au monde et sans cohésion sociale suffisante, il ne sera pas possible de produire des richesses de manière suffisante pour faire face à la pauvreté dans notre pays. Les objectifs de réduction de la pauvreté n’ont pas été atteints à l’échéance 2015. Ces objectifs requièrent un taux de croissance économique de 7%/an pendant plusieurs années. Nous en sommes loin et l’environnement économique avec la crise économique au Nigéria est défavorable à moyen terme. Les populations démunies dans notre pays qui constituent la majorité silencieuse sont celles qui sont victimes des grèves. Or sans une approche d’anticipation, les grèves risquent de reprendre dans quelques mois. Il est donc urgent de profiter de ce moment de répit pour se lancer, de manière déterminée, dans la mise en œuvre de la nouvelle approche proposée par le Forum Bénin-Suisse.
Propos recueillis par Steve HODA